Lire ou ne pas lire, telle est la question ! Tout parent espère que son enfant aime la lecture, « sésame » vers la réussite scolaire. Mais, on peut savoir lire, sans aimer cela…
Lecture scolaire et lecture plaisir
Au cours de mes années d’enseignement, j’ai croisé de bons élèves n’appréciant pas spécialement la lecture et des élèves en difficulté totalement mordus de bouquins… S’il est indispensable de maîtriser un certain niveau de lecture pour accéder aux apprentissages, rien n’oblige les enfants à aimer lire. Cependant, ceux qui affirment ne pas apprécier les livres s’opposent plutôt à l’exploitation des livres en classe qu’aux livres eux-mêmes.
On constate facilement que dès la crèche et l’école maternelle, les enfants sont attirés par les livres, aiment tourner les pages, regarder les images et se raconter l’histoire à voix haute. La lecture est souvent l’occasion de rassembler le groupe dans le calme, quelque soit l’âge des élèves. Daniel Pennac indiquait même lors d’une récente d’interview pour Playground qu’il faisait la lecture à ses élèves de collège. Le problème ne vient donc pas du livre, mais de son exploitation en classe.
Quelle place pour la lecture au quotidien ?
Si on met de côté les difficultés d’apprentissage de la lecture qui réclament une prise en charge spécifique, on se rend compte qu’on peut enseigner la lecture, sans nécessairement donner le goût de lire. Les programmes de 1989 donnaient la part belle à la littérature en lui reconnaissant un rôle primordial dans la formation de la pensée, la réflexion et même la moralité. Depuis lors, le retour aux « fondamentaux » a fait perdre de vue les qualités éducatives de la littérature. Entre temps, le contexte a également changé.
Sans vouloir tomber dans les clichés, l’omniprésence des écrans éloigne les enfants de la lecture. Même les enfants appréciant les livres pourront avoir le sentiment de ne pas avoir le temps de lire. En cause ? La part grandissante dans leur temps libre aux dessins animés, jeux-vidéos et surtout youtube.
Compétences de lecture visées dans les programmes
Le volet « Français » des programmes du cycle 2 (GS à CE2) met surtout l’accent sur l’acquisition des compétences de lecteur : déchiffrage, lecture à voix haute, fluidité, compréhension littérale et maîtrise du vocabulaire de base. La littérature n’intervient que comme support de la lecture. Il est recommandé :
« la fréquentation d’œuvres complètes (lectures offertes ou réalisées par les élèves eux-mêmes, en classe ou librement) [qui] permet de donner des repères autour de genres, de séries, d’auteurs… Cinq à dix œuvres sont étudiées par année scolaire du CP au CE2 . Ces textes sont empruntés à la littérature de jeunesse et à la littérature patrimoniale (albums, romans, contes, fables, poèmes, théâtre) . Les textes et ouvrages donnés à lire aux élèves sont adaptés à leur âge, du point de vue de la complexité linguistique, des thèmes traités et des connaissances à mobiliser.
Les lectures autonomes sont encouragées : les élèves empruntent régulièrement des livres qui correspondent à leurs propres projets de lecteurs ; un dispositif est prévu pour parler en classe de ces lectures personnelles.
La lecture met à l’épreuve les premières connaissances acquises sur la langue, contribue à l’acquisition du vocabulaire ; par les obstacles qu’ils font rencontrer, les textes constituent des points de départ ou des supports pour s’interroger sur des mots inconnus, sur l’orthographe de mots connus, sur des formes linguistiques. »
La liste de références de l’Education Nationale
Le choix des œuvres revient aux enseignants. Pour les aider, ils disposent d’une base de ressources sélectionnant des ouvrages par genres et niveaux de difficulté. Vous pouvez retrouver la liste pour le cycle 2 (base de 2013) ainsi que la liste pour le cycle 3 (base de 2013) sur le site Eduscol. Par ailleurs, les professeurs sont libres de choisir des livres en dehors de ces listes.
Une approche à double entrée
Selon les instructions officielles, l’approche de la littérature est double. En effet, elle est à la fois prescriptive, avec 5 à 10 œuvres étudiées en classe, et personnelle, avec les livres choisis et présentés par les élèves.
Dans les deux cas, l’enfant peut être mis en difficulté.
L’étude de textes à l’école
Des questionnaires rébarbatifs
L’étude d’une oeuvre en classe a souvent mauvaise presse auprès des élèves (et des parents aussi!). Elle est perçue comme rébarbative, longue, ennuyeuse…Les élèves doivent répondre, par écrit, à des questions de compréhension et de vocabulaire. Malheureusement, le découpage du texte en séquences ou thèmes peut éloigner le lecteur du fil narratif et perdre les plus faibles en cours d’étude. Un enfant aime lire pour connaître la suite, pas pour analyser une mise en abîme ! Il faut donc trouver un équilibre entre rythmes de lecture et étude. Et éviter que la lecture ne se transforme en un exercice interminable…
Des niveaux de lecture disparates
Au sein d’une même classe, les niveaux de lecture varient. Difficile de toucher juste avec un même livre pour tout le monde. Certains auront tout lu d’une traite pendant que d’autres n’en seront qu’au chapitre 2… Les profs regorgent d’astuces pour tenter de rassembler tout le monde en même temps :
- travail allégé pour les uns,
- prise en charge d’une partie de la lecture pour d’autres,
- questions ou travail supplémentaire pour d’autres (écriture, dessins etc.)
- entraide et travail en groupe.
Trouver un livre rassembleur
Les adaptations pédagogiques ne manquent pas, mais au final l’enseignant reste souvent « sur sa faim ». Et les livres dont on peut dire qu’ils ont rencontré un franc succès auprès des enfants ne sont pas si nombreux. Ce qui explique que parfois les profs étudient le même livre plusieurs années de suite. C’est parce qu’ils savent que celui-là plaira à un grand nombre ! On compte aussi sur les conseils des collègues pour étoffer notre répertoire. Une équipe qui fonctionne bien « mutualise » toujours !
Lectures personnelles des élèves
Où trouver des ouvrages ?
Les auteurs des programmes ont bien conscience que ce n’est pas uniquement par des lectures imposées que les élèves s’approprieront la littérature. Ils ont prévu d’inciter la lecture personnelle par le biais d’emprunts à la bibliothèque, de prêts entre élèves, de présentations orales sur un temps dédié. Par ailleurs, si vous avez besoin d’idées, la rubrique Le coin lectures et activités du blog peut vous aider !
Exposer son choix de lecture
Mais là encore, certains élèves vont se trouver en difficulté. Les indécis ne sauront que choisir, les boulimiques en jetteront plein la vue aux autres et les petits lecteurs se verront peut-être refuser un manga ou une BD des blagues de Toto… Laisser la liberté de choix aux élèves implique une mise en avant de soi et une prise de risque. « Que vont penser les autres de mon choix ? Comment vais-je présenter ce livre à l’oral ? »
Là, vous vous dites : » Ben alors, on fait comment ? C’est bien gentil de relever les problèmes, mais quelles solutions y apporter ? »
La perfection n’existe pas. Il n’y a pas de solution unique ou miracle. Je vous présente quelques pistes en deux articles :
- l’un axé sur la lecture à l’école,
- l’autre à la maison.
Liens utiles :
- le site officiel du ministère de l’Education nationale : Mobilisation en faveur du livre
- rapport du ministère sur l’apprentissage de la lecture à l’école primaire (pdf)
- voir le dispositif ROLL d’accompagnement à l’apprentissage de la lecture. Olivier, prof de CM2 en parlait lors de notre rencontre autour du théâtre et l’enseignement de l’histoire.
Bonjour, il est dommage de ne pas mentionner les cdi dans les collèges et le travail des documentalistes pour la promotion de la lecture plaisir…
Bonjour Vanessa,
Merci pour votre commentaire qui permet de rappeler l’excellent travail des cdi et des documentalistes ! Mon expérience de professeur des écoles me porte à commenter et analyser surtout ce qui se passe à l’école primaire. Mais évidemment le sujet concerne aussi les élèves du secondaire. Merci à vous de le souligner 😊